Le blog de Petite Pépée

les chevaux couraient un peu trop vite sur les collines.  Leur bave d'écume scintillait. La mort les chevauchait. Le soleil flamboyant me rassurait. Mon oreiller accueillait mes rêves, paisiblement, pendant que les chevaux galopaient, galopaient. Je faisais tout ce que mon rêve voulait de moi. Mes cheveux épars transpiraient. 

Il fallait m'arracher à ce rêve et rejoindre le miroir, maquiller mes cernes. Laisser la colline loin dans mon dos. Abandonner ma petite chatte et la nourrir. Te dire au revoir, mon amour, à ce soir.

XXX

Ouvrir la porte, chercher les clefs au fond du grand sac de cuir gris. De grandes fleurs brodées, des rouges bordeaux, des vertes. Tu es déjà parti loin, ta grande écharpe de petit prince  autour de ton coup d'Homme libre. Je ferme la porte à clefs, je suis en retard.

Croque Monsieur le Crocodile, est tout près de moi. - Viens! me dit-il. Je caresse sa peau, douce et rugueuse  comme un sac Chanel.  - Je te protégerai, n'ai pas peur. Crocodile me prend dans ses bras. Il lui pousse des ailes, nous nous envolons. Du haut des cieux, Je vois ma petite chatte Poupoule et suis triste car elle s'ennuie de moi et de toi, elle pleure. Elle miaule.  Mais pour s'accrocher à la vie, il faut se décrocher de ceux qu'on aime. Je reviendrai ce soir, Poupoule, après une journée de travail. 

Croque -monsieur me demande si je veux  aller boire un petit café avec lui. IL connait un endroit sympa. Je m'énerve sur lui car Croque -Monsieur ne connaît rien aux réalités de la vie: il faut que je sois à l'heure au travail. Que je raconte des histoires aux enfants. L'heure du conte avance à grands pas. Croque-Monsieur me dit qu'il compte autant qu'un travail, autant qu'un enfant. Je l'écoute. Nous nous arrêtons devant une maison gigantesque, à l'intérieur c'est si beau que je crois mourir, mon coeur bat si fort qu'il me fait mal, la tristesse s'irrigue dans le réseau de mes veines, de grandes colonnes puisent leurs forces dans un sol de pierre et bandent jusqu'au plafond. Je crois tomber amoureuse du lieu, et je me demande où tu es. Où es-tu Oh amour de ma vie. Et où est passé Croque Monsieur?

XXX

J'avance seule dans les grands couloirs. Des couleurs de toutes les couleurs me bercent, m'acceuillent étrangement. Un drôle de chambellan avec un monocle s'approche de moi. _ Vous cherchez quelqu'un ou bien quelque chose? Je cherche Croque-monsieur, mon crocodile ailé. - Mais voyons madame, les crocodiles ne volent pas. - Le mien, oui. Je continue mon chemin, j'arrive dans une grande salle. Des gens de toutes les époques boivent des café, du thé, du vin. A une table les chevaux de mon rêve. Ils me saluent amicalement, grâce à moi  ils sont libres, seule la mort à un pouvoir sur eux, mais non les Hommes. Crocodile est là, il m'a pris une viennoiserie que j'ai honte de manger, j'ai peur de grossir. Mais Croque -Monsieur me dit que je suis belle et que je ne dois pas m'en faire. Le chambellan n'en croit pas son monocle lorsqu'il nous voit, Croque-Monsieur et moi. 

Le soir arrive. Nous faisons tous une fête, tu arrives avec ton écharpe, tes yeux rouges, Poupoule sur ton épaule. Croque-Monsieur et toi vous vous livrez un duel. Tu le tues. Je dis au revoir à mon crocodile ailé, puis nous repartons à la maison. Ce soir pendant que tu me casseras, des gouttes de miel me sortiront des yeux.