Le blog de Petite Pépée

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Contes et légendes revisités


Le petit cochon charmant et la truie dépressive/ deuxième partie

Le matin était si beau que Gédéon décida de redevenir ce qu'il était : un porc. Ce matin-là, Gédéon ne se leva pas pour aller travailler à la banque, et resta dans son lit. Les heures passèrent avec préciosité et délectation, Gédéon se sentait flotter sur une grosse bulle rose comme sa peau de porc, une bulle increvable et fière, une grosse bulle de champagne qui fêtait son animalité retrouvée. Des images de boue et d'oisiveté passaient dans la tête de Gédéon, toutes plus pâles et plus douces les unes que les autres. Gédéon savait qu'il n'avait pas besoin de la société  et que la société n'avait pas besoin de lui.
 
Lorsque Gédéon décida enfin de sortir de son lit, il le fit à quatre pattes, et, en reniflant de manière jouissive, il  trotta vers une flaque de boue qui paressait dans son jardin. Il finit par y sombrer avidement. Alors, pour la première fois depuis très longtemps, Gédéon se sentit bien. Sa peau hypersensible cessa de le gratter et toutes les petites bêtes de vermine qui le torturaient furent recouvertes d'une épaisse couche de boue. Gédéon ne sentit plus rien. Il était heureux, loin des projets d'assimilation que la société avait pour lui projeté. Gédéon était redevenu un petit cochon.
 
Le premier jour fut pour Gédéon un jour de félicité. Il le passa dans se flaque de boue et décida de ne pas faire la vaisselle. Lorsque le soleil disparut derrière son sol de croûte, Gédéon rentra chez lui et se coucha en étalant de la boue dans ses draps.
 
Le deuxième jour fut tout aussi délectable, car Gédéon se leva très tard, le soleil était sur midi quand il décida de se lever.
 
Le troisième jour la maison de Gédéon commença  peu à peu à ressembler à une porcherie, la vaisselle sale sentait et la boue s'était étendue de manière étrange dans toute la maison. Seul un vrai porc pouvait s'y sentir chez lui. Gédéon ne cessait de prendre des bains de boue, il mangeait ce qui voulait bien se présenter devant son groin, les mouches commençaient à affluer autour de ses crottes pour s'y délecter, une curieuse odeur naturelle commençait à s'échapper de la maison de et les voisins dégoûtés, commencèrent à se poser des questions.
 
Le quatrième jour, des policiers se présentèrent à sa porte, des voisins avaient porté plainte. L'odeur de Gédéon et de sa porcherie empestait tout le quartier, un comité s'était constitué à la hâte, Gédéon n'était qu'un sale porc, après tout, il venait bien d'une famille de porcs. Comment un porc pouvait-il  vivre dans un quartier d'honnête gens, des banquiers qui ne demandaient qu'à se lever tôt, qu'à travailler et à sentir bon ? Un des deux policiers fit remarquer lui fit qu'il eut été de bon ton que Gédéon quitte les lieux, qu'au fond il rentre chez lui. Ce n'était pas malveillant de sa part, ajouta le policier, c'était juste un conseil, c'était juste le conseil d'un porc lui aussi, qui connaissait le mépris et la haine. C'était le conseil d'un porc qui s'était déguisé en agent de l'ordre pour survivre. Mais Gédéon était allé trop loin. Il ne pouvait même plus parler, toutes ses réponses ne furent que des reniflements et des grognements, c'était tout. Gédéon savait qu'il ne partira pas : il ferait comme le font les porcs et laisserait tout aller.

14/03/2013
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Le petit cochon charmant et la petite truie dépressive, première partie

Il était une fois, il y a fort longtemps, un petit cochon qui avait été élevé au sein d' une société qui n'aimait pas les cochons.  Les cochons y étaient décrits comme des être gros, vulgaires et sales. De surcroît, ils étaient dépeints comme des fainéants. Aussi, la famille Porkski avait fait de gros efforts pour être acceptée par sa société, et elle avait élevé le petit Gédéon comme un autre. Gédéon avait appris à se tenir debout sur ses deux pattes arrière et à dresser son menton vers le ciel. Il avait appris à se laver avec de l'eau et du savon et non pas à se tremper dans les flaques de boues, qui pourtant passaient leur vies à le tenter, telles des putes dispersées, vulves à l'air,  autour de la maison des Porkski. A l'école, Gédéon avait appris à penser le temps et puis surtout à se préparer à l'avenir, comme tous les gens normaux le faisaient. A côté de tout cela, il avait fait des études longues, pénibles et ennuyeuses, et il était sorti de l'Université avec un beau diplôme à la main, qui le conduisit  tout droit au guichet d'une banque où il ouvrirait et fermerait des comptes pour les 30 ans à venir. A la banque où il travaillait, Gédéon donnait satisfaction. Aussi pour le récompenser, on lui avait offert, non sans ironie, une jolie tire-lire qui représentait un porc rose à quatre pattes, qui avait été élimé puis creusé dans le dos, afin d'obtenir sur celui-ci une petite fente visible, évidente comme une humiliation, à l'intérieur de laquelle on pouvait glisser une pièce de 2 euros.

 

Gédéon était rentré chez lui, et, juste après avoir déposé son obscène tire-lire sur sa cheminée, il avait compris qu'il était cette tire-lire, il avait compris que sa société utilisait les innocents petits porcs plein de bonne volonté, qu'elle les culpabilisait afin qu'ils veuillent s'assimiler, qu'elle les culpabilisait afin d'obtenir d'eux ce qu'elle voulait pour en faire des petite tire-lires .  Gédéon se coucha sur son matelas, se borda de sa couverture en patchwork, et, avant de s'endormir et de plonger dans un monde de boue, il se mit à en vouloir furieusement à ses parents d'être tombés dans le piège qu'on leur avait tendu.

 

 

Lorsqu'il se réveilla, la peau rose et sensible du petit Gédéon le grattait encore plus que d'habitude, ça le démangeait comme jamais ça ne l'avait démangé depuis longtemps, depuis son enfance. Le matin émergeait de la nuit. Le soleil, en forme de grosse boule rouge, une boule d'amour et de feu, montait sereinement comme la vie vers le ciel. Le soleil, comme un gros clitoris gonflé, comme une fleur de vie, épanouïe, amoureuse, le soleil, de sa grosse boule rouge orangé ,indolente, exerçait sereinement son ascendance et semblait faire des clins d'oeil à Gédéon, le petit cochon rebelle.

 

 

 

 

 

 

 


02/03/2013
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La naissance du petit chaperon rouge

Il était une fois, il y a fort longtemps, une petite fille aux seins naissants qui s'ennuyait beaucoup. Toutes les nuits, en rêve, des dents longues et aiguisées venaient lui marquer la peau, des yeux sortant de leurs orbites la mangeaient , une longue queue très très fine venait la harceler. Ce cauchemar  était si terrifiant que  la petite  se réveillait chaque matin couverte de sueur, terrorisée mais au fond d'elle, ravie. Le cauchemar du loup dont on lui avait décrit les contours dans sa plus tendre enfance, un loup affolé par les petites filles au seins naissants, un loup ne pouvant se retenir de mordre, était la seule chose qui lui arrivait dans la vie. Aussi, c'est avec  angoisse mais  impatience que la petite fille aux seins naissants se couchait chaque soir.

 

Le père de cette petite fille était un père absent. Il n'était pas vraiment parti, il n'était pas comme tous ces pères déserteurs qui abandonnent leur femme et leurs enfants. Au contraire, c'était un père très présent, peut-être un peu trop. Lui aussi avait des yeux qui lui sortaient des orbites chaque fois qu'il voyait une femme, et ces yeux -là restaient collés de près au corps balbutié de sa petite fille devenant   femme, comme fascinés et émus de la fleur à peine éclose. C'était un regard admiratif, mais ce n'était pas un regard bienveillant pour la fille d'un père, et la petite fille aux seins naissants ne savait que faire de ce regard de père absent, c'est-à-dire de père absent à son rôle de père. 

 

Plongée dans une peur exaltante qu'elle ne pouvait nommer, la petite fille voulut un jour se confier  sa mère.

 

 - Qu'y a-t-il, ma petite fille? lui dit -elle?

- Papa me regarde avec des yeux bizarres! dit la petite fille aux seins naissants. Chaque fois qu'il me regarde, ces yeux sortent de ses orbites!

- Hahaha! Lui dit sa mère, mais c'est normal, il ne faut pas t'inquiéter. Ton père est un homme! Quand il te regarde, il a les yeux qui bandent! Et elle éclata de rire. Elle avait l'air de se moquer un peu de son mari aux yeux si sensibles et si érectiles. Alors la petite fille aux seins naissants prit  son père en pitié. Elle regarda sa mère vieillissante et se mit à la détester, elle et son rire mauvais. Pauvre papa! se dit la petite fille aux seins naissants! Il n'a jamais droit à rien. Il reste là, toute la journée, à regarder les photographies d'un monde mort, et sa femme aux seins qui tombent n'essaie même plus de le séduire. Pourtant je suis sûre qu'il serait prêt à prendre n'importe quoi, prêt à tout pour soulager ses yeux qui bandent.

 

La mère continua:

 

- J'ai ce qu'il te faut pour te protéger du regard des hommes! J'étais juste en train de te coudre un manteau pour marcher la foret, car bientôt il faudra que tu la traverses pour apporter des galettes de beurre à ta grand-mère qui ne peut plus se déplacer. Malheureusement il ne me restait plus que du tissus rouge, c'est un peu vif et ça attire les regards, mais cela cachera tes formes. La petite fille enfila son nouveau manteau et sa mère s' émut : " Oh! ma petite fille! comme tu es jolie dans ce manteau rouge! On ne voit pas du tout que tu deviens une femme, cela me rappelle le bon temps! On ne voit pas non plus que tu as pris un peu de poids, cela te va très bien!"

 

A partir de ce jour, la petite fille aux seins naissants porta tous les jours son manteau rouge, et tout le monde l'admira et la trouva fort jolie dedans. Son père put à nouveau  la regarder sans se sentir coupable de rien, et la trouva merveilleuse. En outre, il adorait le rouge vif de son manteau, et se mit à faire des photos d'elle dans ce manteau rouge, sans qu'il ne soit soupçonné d'aucun vice, sans qu'il n'y ait jamais de remarque de l'école, des voisins, ni de problème d'aucune sorte. Les formes naissantes de la petite fille contre les yeux desquelles le pères se butaient étaient comme devenues un secret morbide entre lui, elle et sa mère, un secret caché mais pourtant désigné par un manteau d'un  rouge si éclatant qu'il était un indice, si vif que tout le monde pouvait voir la couleur éclater comme un deuil au grand jour, sans que pourtant personne n'y vit rien du tout.

 

Et c'est sans se douter rien, que les gens alentours nommèrent la petite fille : " le petit chaperon rouge."



17/02/2013
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